[FINI] Le coeur du vampire, chap.15 en page 3

Lorsque Lilith émergea des brumes du sommeil, réveillée par le carillon tonitruant de l’horloge ancienne du rez-de-chaussée, il était vingt heure. Elle sentait qu’Edward l’attendait. Elle refermait paresseusement les paupières quand l’absurdité de ses pensées la fit se réveiller complètement. Elle était intimement persuadée que le vampire n’était pas dans sa chambre, il était...dans la bibliothèque !? Elle le sentait comme jamais, un lien intense entre eux, profond et puissant. Troublée, elle se prépara à la hâte, négligeant chaussettes et chaussures comme à son habitude.
Elle se dirigea directement dans la chambre d’Edward. Sans hésiter, elle tira un tiroir de sa table de nuit, saisi la petite clef et sorti de la chambre le plus naturellement du monde. En refermant derrière elle, elle senti un court instant une autre présence, beaucoup plus éloignée, plus ténue mais perceptible, une présence fugace, noire qui lui provoqua un violent frisson.
Troublée, la jeune fille se dirigea sans hésiter le long des couloirs vers une pièce qu’elle n’avait jamais vue. Arrivée devant la porte en bois massif, la main sur la poignée, elle savait qu’il était là, comme s’il était à côté d’elle.
Puis tous fit sens dans sa tête, l’impératrice ne l’avait pas soulagée comme elle l’avait d’abord imaginée, elle n’avait pas éliminé sa souffrance de sa mémoire. Non, elle avait fait pire. Elle avait ouvert la voie au sang. Ce sang qui la reliait à Edward n’avait désormais plus aucune barrière psychique et déferlait sur lui. Sur eux. Edward avait alors absorbé sa douleur en lui renvoyant un sentiment de paix. William ne lui envoyait rien, pas encore, il était trop loin. Elle se mit à pleurer silencieusement, laissant les larmes couler le long de ses joues, la main sur la poignée, incapable de bouger.
La porte s’ouvrit à la volée. Edward lui tendit un mouchoir blanc brodé à ses initiales et la fit entrée, refermant soigneusement la porte derrière eux. Il la fit ensuite asseoir dans un fauteuil en cuire. Elle se moucha bruyamment avant de lever les yeux. Une femme vêtue de cuir noir la regardait. Ses cheveux aux boucles brunes entouraient son joli visage aux yeux noirs et aux cils interminables. Elle portait un crâne en guise de collier et un crâne de bélier fermait le bas de son corset, là où commençait sa mini-jupe. Le bandage à l’une de ses mains et le poignard dans sa botte fini de convaincre Lilith que cette femme était dangereuse.
- Lilith, commença Edward, je te présente Shana, une démone mercenaire, je l’ai engagée pour notre prochaine mission
La jeune fille hocha la tête en direction de la démone qui fit de même, ses boucles découvrant soudainement une paire de cornes pointues.
- Shana va nous aider à traquer William, assena le vampire
Sursautant, Lilith se tourna vers lui et se mit à trembler. Alors c’était à ça que pensait l’impératrice, elle voulait se servir d’elle pour traquer le monstre. Repoussant cette idée de toutes ses forces, elle secoua frénétiquement la tête négativement avant de cacher son visage dans ses mains.
- Lilith, tu es la seule qui puisse le localiser...
Elle se mit à secouer de nouveau la tête de droite à gauche.
- Shana est là pour assurer exclusivement t’as sécurité, Alfonse et Amélia seront également du voyage et je suppose qu’Annabelle nous suivra
Prostrée dans son fauteuil, la jeune fille ne bougeait plus. Elle songea à l’impératrice et une vague de colère la submergea.
- Lilith ! la réprimanda le vampire, je t’interdis de penser ces choses de l’impératrice, elle ne l’a pas fait par plaisir, elle a fait ce qu’il fallait pour arrêter William
Elle leva un regard humide sur lui, un regard chargé de colère. Alors elle n’était qu’un moyen pour chasser William, il ne l’avait gardée près de lui que parce qu’elle avait son sang en elle, il savait ce qu’allait faire l’impératrice depuis le début.
- Oui, tu as tout compris, soupira-t-il en se passant une main dans les cheveux
Tremblante, la jeune fille se leva et s’approcha de lui. Ses yeux droits dans les siens, elle leva son bras lentement, avant de le gifler de toutes ses forces. Il n’avait pas arrêté son geste, acceptant sa punition, résigné. Elle observa sa joue devenir rose sous le coup avant de tourner les talons et de retourner dans sa chambre au pas de course.
- Eh bien, susurra la démone, le petit agneau a de la répartie
- Va lui dire de préparer ses bagages, nous partons dans une heure, répondit Edward avant de quitter la pièce

Fourrant rageusement ses vêtements dans sa valise sous le regard froid de Shana, Lilith tentait de se calmer. Edward les attendait dans la voiture. Elle ne voulait par être assise à côté de lui. Fort heureusement, la voiture était suffisamment grande et elle avait décidé de placer la démone entre eux. Elle referma sa valise violement et la traina jusqu’au garage, suivie de près par la démone. Tandis qu’Alfonse chargeait le coffre de leurs bagages, Edward tenait la portière à la jeune fille qui s’engouffra dans le véhicule sans un regard vers lui. Se baissant pour entrer à son tour, il se reçu un coussin en plein visage. Imperturbable, il se redressa et laissa Shana entrer avant lui.
Le voyage se passa dans le silence le plus complet et une atmosphère électrique. Ruminant sa colère, Lilith se demanda si Alfonse était également au courant. Elle eut soudain le sentiment profond que non. Une réponse d’Edward qu’elle savait sincère. Soulagée, la jeune fille soupira. Elle n’aurait jamais pu supporter d’être fâchée contre le vieil homme très longtemps. Sa pensée fit mouche chez Edward qui se renfrogna, vexé.
Ils arrivèrent enfin aux alentours de treize heures au manoir. A peine la voiture dans le garage, Lilith se précipita sur la poignée et parti en courant sur la porte qui donnait directement dans la cuisine. Amélia tournait paresseusement une énorme cuillère en bois dans une marmite, Annabelle assise à ses pieds en train de caresser Loucifer. La fillette émit un cri perçant avant de se jeter au cou de la jeune fille qui la serra contre elle, soulagée. Sa présence lui avait affreusement manquée. Amélia se mit à sautiller gaiement en lui souhaitant la bienvenue.
Edward entra à son tour et se dirigea immédiatement dans son bureau. Alfonse, les valises sous les bras, se dirigea vers les chambres pour ranger leurs affaires, suivi de près par Shana, son sac de voyage sous le bras.
- Oh ! s’exclama le zombie, qui est cette femme ?
Annabelle s’empressa de donner une feuille et un crayon à Lilith.
- Un démon mercenaire ? pourquoi faire ?
Elle rendit la feuille à Lilith.

Le carillon sonnait vingt heures lorsque Lilith se mit au lit, après avoir lavé son visage à l’eau froide pour se calmer. Depuis cette discutions dans la bibliothèque du palais, son cœur battait à un rythme effrayant dans sa poitrine. Elle avait peur. William était l’incarnation du mal.
Annabelle apparu dans son champ de vision, la faisant violement sursautée, effrayant la petite à son tour. La couchant près d’elle, Lilith lui caressa les cheveux pour l’apaiser.
- Maman ?
La vampire baissa les yeux vers elle.
- Dit maman, quand vous irez chasser le méchant monsieur, je pourrais venir ?
Lilith hésita, elle ne voulait pas que la petite soit choquée par les atrocités qui ne manqueraient pas de se dérouler sous ses yeux.
- Maman ?
Lilith se contenta de la serrer contre elle en lui caressant le dos doucement pour l’endormir. Posant sa joue coutre celle, froide, de la fillette, Lilith regretta de ne pouvoir lui chanter une berceuse.

Le lendemain, Lilith resta un long moment à contempler la fillette. Elle avait l’air si fragile et pur que son cœur manqua un battement. S’éclipsant sans la réveiller, Lilith se lava rapidement et sans bruit avant de s’habiller et de vagabonder dans les couloirs. Elle se rendit au grenier. Récuré de fond en comble, il sentait bon le pin. Apaisée dans ce lieu, elle s’allongea sur le sol en plein milieu et fit le vide en elle, les yeux sur une poutre apparente de la charpente. Quand le noir et le silence se fit en elle, elle chercha le sang. Elle trouva sans peine Edward, qui faisait les cents pas dans sa chambre, à quelques mètres d’elle. Faisant à nouveau le noir en elle, elle chercha l’autre sang, le premier qu’elle avait reçu, celui qu’elle avait voulu oublier. Il se terrait, quelque part en elle. Un violent frisson la parcourue lorsqu’elle le trouva. William était beaucoup trop loin, elle ne le sentait pas, même de façon ténue, le lien était brisé par la distance. Le malaise qui l’avait prise dans la voiture, ce devait être William qui lui envoyait une pensée, il était tellement plus fort mentalement, elle ne pouvait pas l’atteindre mais lui oui. Ou alors sa peur l’empêchait de laisser aller pleinement ses pensées vers lui. Elle soupira en se relevant et descendit à la cuisine.
Tout le monde dormait encore. Elle se servit un verre de sang et l’avalât d’un trait. Elle ne s’y était toujours pas habituée et en était encore légèrement dégoûtée, alors même que son corps en réclamait sans cesse. Assise sur le banc, les coudes sur la tables et la tête dans ses mains, c’est ainsi qu’Alfonse la trouva.
- Mademoiselle ?
La jeune fille sursauta, avant de se tourner vers lui et de lui adresse un pauvre sourire tremblotant. Le majordome soupira et se posa sur le banc à ses côtés.
- Je devrais sans doute laisser au maître le soin de vous expliquer son implication dans cette histoire mais il est trop fier pour se confier et vous n’êtes pas d’humeur à l’écouter, commença le vieil homme
Elle hocha la tête, attendant la suite.
- William a tué beaucoup de monde, notamment son mentor, le vampire qui l’avait fait renaître, et qui avait également fait renaître le maître peu de temps avant lui, William et lui étaient amis en ce temps là
Il fit une pause, laissant les mots imprégner les pensées de la jeune fille. Elle écarquilla les yeux.
- William était de plus en plus instable et c’est le maître qui a finalement découvert le massacre, s’en est suivi un terrible combat que le maître a gagné, mais il a été incapable d’achever William, l’Empereur a alors nommé le maître en tant qu’héritier de son créateur, Lord Marcus et lui a ordonné de traquer le traître
Il fit une nouvelle pause et Lilith hocha la tête, l’incitant à continuer son récit.
- La folie furieuse de William n’avait jamais dévié, il répétait toujours le même schéma, celui qui lui était arrivé quand il était encore humain, les mauvais traitements, mais sans les sévices sexuels, jusqu’à…
Le vieil homme fut pris d’une quinte de toux et la jeune fille s’empressa de lui apporter un verre d’eau. Alfonse laissa reposer sa voix quelques instants, le temps de finir son verre.
- Veuillez m’excuser, mademoiselle, s’exclama-t-il
Lilith hocha la tête avec un sourire, lui signifiant que ce n’était pas grave.
- Je disais donc qu’il reproduisait inlassablement le même schéma, jusqu’au jour où ce fut votre tour
Le vieil homme plongea son regard dans celui de la jeune fille.
- Vous l’avez perturbé, mademoiselle, il vous a gardée plus longtemps et vous a fait don de son sang, et après vous il n’yen a pas eut d’autres…
Le vieil homme laissa ses mots faire leur effet. Lilith, détourna le regard, effrayée.
- Il s’est passé quelque chose entre vous deux, je ne vous demanderai jamais quoi, mais il semble qu’il se soit attaché à vous…
Elle secoua négativement la tête avant d’approcher la main de son cou, de sa cicatrice.
- William est un psychopathe, mais à sa manière il semble qu’il tienne à vous, le maître est persuadé qu’il viendra vous chercher, ce qui vous est arrivé dans la voiture, ce n’est pas le fruit du hasard, William entre en contacte avec vous, il veut savoir où vous êtes, ce que vous faites, à quoi vous penser
Lilith secoua encore la tête, refusant ses paroles.
- Sa victime suivante a été rejetée vivante, il ne lui a fait aucun mal, il ne s’est même par nourri, il s’est contenté de la libérer et il n’y en a pas eut d’autres depuis…
La porte s’ouvrit à la volée, les faisant sursautés. Edward entra dans la pièce. Le majordome se leva à toute vitesse pour lui préparer son verre de sang matinal.
Edward s’assit à côté de la jeune fille qui ne le repoussa pas.
- William…, commença-t-il, …c’est toi qu’il veut, mais il ne sait pas pourquoi et il te fera probablement du mal pour comprendre pourquoi
Lilith prit soudain conscience qu’il la tutoyait depuis le bal. Qu’elle pensée saugrenue compte tenu de la situation, se réprimandât-elle mentalement. Perplexe, Edward paru s’en rendre compte également et se reprit.
- Si vous ne voulez pas être sa proie, alors vous devez devenir le chasseur, vous ne serez en paix que lorsqu’il sera mit hors d’état de nuire, mort ou vif
Il observa la jeune fille un long moment, attendant une réponse. Lorsqu’elle hocha la tête affirmativement, il se relevât.
- Bien, Shana va vous apprendre quelques petites techniques de défense, au cas où, et je vous apprendrai à maîtriser votre mental, vous ne devez pas vous laisser manipulée par William, vous devez lui résister, nous y passeront le temps qu’il faudra pour vous préparer à l’affrontement
Sur ces mots, il reparti dans son bureau préparer fébrilement l’organisation de sa nouvelle stratégie. Laissant Lilith en pleine confusion et Alfonse, tenant toujours le plateau avec le verre de sang que le vampire n’avait par touché, ni même regardé.

Il faisait les cents pas, fatigué, affamé, dans cette mine désaffectée depuis trois jours. Elle l’obsédait. Même loin d’elle, elle était dans toutes ses pensées. Son image était incrustée dans ses rétines. Depuis qu’il l’avait abandonnée, mourante, il n’était plus le même. Il ne se reconnaissait plus. C’était la première fois qu’une victime ne poussait aucun son. Cela l’avait perturbé. Il avait pris moins de plaisir à la torturée. Il s’était surpris à la soignée comme une fleur délicate. Elle ne l’avait jamais repoussé, n’avais jamais essayé de le frapper. Il avait bien sentie que, dès le départ, elle voulait mourir, avant même qu’il ne la touche pour l’enlevée. Il l’avait suivie chaque soir quand elle rentrait chez elle. Il sentait sa peur à chaque fois qu’elle tournait la poignée, juste avant d’entrer. Il avait entendus les cris de la vieille folle qui lui hurlait des insanités dès qu’elle bougeait le petit doigt.
Cela lui avait fait songé à son passé. L’attitude de cette fille, c’était la sienne. Le chevalier qui l’avait maltraité, lui promettant de faire de lui son écuyer…il poussa un long hurlement de douleur mêlé de rage avant de se mettre à cogner contre les parois de terre de la mine. Elle était comme lui, elle était lui. Cette idée le stoppa net dans son élan, ses mains ruisselaient de sang. Si elle était lui, alors cela voulait dire qu’il devait la débarrassé de son chevalier, cette vieille folle hurlante. Cela lui ferait certainement plaisir. Il sursauta à sa propre pensée. Il voulait lui faire plaisir ! Cela n’avait aucun sens, il s’affaiblissait, les sentiments étaient pour les faibles...non il n’était pas faible, mais il la voulait. Son corps la réclamait. Il ne savait par pourquoi, il s’en fichait. Il ne voulait que son bonheur.
- Lilith, murmura-t-il dans un souffle

Les leçons ne commencèrent que le lendemain. Le matin se passa avec Edward qui entraînait son mental à être plus solide. Il lui envoyait des pensées qu’elle devait bloquer aux mieux. Les après-midi se passaient avec Shana. La démone ne lui laissait aucun répit. Elle lui avait donné une lourde barre de fer avec laquelle elle devait frapper un sac de sable que la démone tenait d’une seule main avec facilité.
Amélia avait eut droit à une évaluation nutritionnelle et il en avait été conclu qu’elle ne mangeait par assez, et que c’était pour cela qu’elle s’émiettait constamment. Elle avait donc ordre de manger deux fois plus, pour que ses tissus se reconstituent entièrement. Alfonse avait également reçu ordre de la rendre moins maladroite et il se demandait encore comment il allait faire.
Les jours passèrent. Amélia avait légèrement grossis, Lilith s’était affinée. Annabelle regardait tout cela de loin, l’air un peu perdu. Lilith faisait des progrès, essentiellement au niveau de sa force mentale. Physiquement, elle avait pris quelques muscles et commençait à maîtriser la barre de fer. Shana avait alors décidé qu’elle était faite pour l’art du poignard. Elle lui apprenait à le lancer et à être plus rapide et réactive.
Une semaine plus tard, Alfonse apporta le journal du matin comme à son habitude lors du petit déjeuner. Alors qu’Edward lisait tranquillement, Lilith aperçu la première page et eut un choc. Son visage blême inquiéta Annabelle qui se mit à pleurer. Lilith revient à elle et serra la main de la fillette dans la sienne avec un pauvre sourire.
- Pourquoi ne pas prendre une journée de repos ? proposa Alfonse, mademoiselle semble un peu fatiguée
Edward soupira et hocha la tête après avoir jeté un rapide coup d’œil à la jeune fille. Puis il se redit à son bureau, abandonnant le journal sur la table. Tous le monde partit vaquer à ses occupations sauf Lilith qui resta assise dans sa chaise, Annabelle toujours accrochée à sa main. Saisissant le journal, Lilith l’ouvrit à la page qui l’intéressait.
…scène abominable qui s’était déroulée dans cette charmante demeure…murs couverts du sang de la maîtresse des lieux…méconnaissable, comme si un animal sauvage s’était acharné sur elle…qui avait déjà vécu la tragédie de perdre sa fille…sa fille perdue, premier suspect dans cette affaire…
Elle laissa le journal tomber au sol, prostrée sur sa chaise. Un éclair douloureux vrilla soudain sa tête. Elle se replia en avant, une main sur chaque oreille sous les cris d’Annabelle et ferma les yeux. Elle fit le noir. Elle n’entendait plus rien. Visualisant une porte, elle l’entrouvrit légèrement. William était derrière, il la regardait, le visage fermé, couvert de sang. Lentement, il approcha. Terrifiée, Lilith n’arrivait plus à bouger, elle n’arrivait pas à détacher ses yeux des siens. Il était si près qu’elle sentait son souffle sur elle. Il leva les yeux et regarda au-dessus d’elle. Elle se senti alors tirée violement en arrière, tandis qu’une main refermait la porte violement. Lilith revient à elle brusquement, debout, sa chaise au sol, son dos collé contre Edward qui la tenait fermement. Un peu trop même.
- Etes-vous devenue folle ? cria-t-il, qu’est-ce qui vous a pris de faire ça ?
Il la retourna vers lui et resserra un peu plus sa prise sur les bras de la jeune fille qui esquissa une grimace de douleur. Il la lâchât violement et elle recula vivement jusqu’à se cogner à la table, effrayée. Les yeux bleus du vampire lançaient des éclairs. Il se passa une main dans les cheveux en essayant de se calmer. Elle sentait la colère et la frustration d’Edward. Elle sentait aussi la sérénité de William. Le lien entre eux s’était renforcé, à son insu.
- Vous rendez-vous compte que votre curiosité aurait pu vous perdre ? gronda le vampire
Lilith secoua négativement la tête, ce qui ne fit qu’attiser sa colère. Elle se baissa prestement pour récupérer le journal et le tendis au vampire. Il le lui arracha des mains et parcouru la page rapidement avant de lever les yeux sur elle.
- Il a tué votre mère, soupira-t-il, savez-vous pourquoi ?
Elle hocha la tête et lui envoya le message mental que William lui avait transmit.
- Je vois, se contenta-t-il de répondre
Pensif, Edward resta silencieux de longues minutes. Il lança un dernier regard à la jeune fille avant de sortir de la pièce précipitamment, probablement pour aller s’enfermer dans son bureau, comme à son habitude. Lilith pourra un soupir de soulagement et Annabelle se précipita dans ses bras. Serrant la fillette dans ses bras avec ardeur, Lilith repensa à la suite du message. William n’était qu’un monstre, pourtant elle avait pitié de lui. A force de se protéger d’une carapace de fureur et de folie, il avait fini par se couper de tout. Pourtant cette carapace, elle l’avait sentie se craqueler.

Edward faisait les cents pas dans son bureau, sous les yeux d’Alfonse, imperturbable.
- Comment a-t-elle pu faire ça ? s’exclama-t-il soudain sans cesser de marcher
- Mademoiselle a du vouloir tester ses limites…
- Elle n’est pas assez forte ! le coupa Edward
- En êtes vous sur ? répondit le majordome
Le vampire se figea, le regard posé sur le vieil homme.
- Monsieur, à trop vouloir la protéger elle va finir par vous échapper
- Explique-toi
- A l’empêcher d’affronter William, elle finira par prendre la décision elle-même, et ce jour là vous la perdrez
- Qu’est-ce que tu raconte, je ne peux pas la perdre, elle ne m’appartient pas
Alfonse se contenta d’un sourire énigmatique.
- Dehors, laisse-moi
- Bien maître, s’inclina le vieil homme
Une fois seul, le vampire recommença à marcher de long en large. Il n’avait jamais été si en colère. Il avait du mal à se maîtriser. Cette fille avait le don de l’agacer.

Le diner du soir se passa dans un silence total, seulement brisé par le bruit des couverts. Amélia et Shana engloutissaient des quantités astronomiques de nourriture. Annabelle, comme à son habitude, regardait les autres manger, une assiette vide devant elle, une main accrochée à la jupe de Lilith. Edward prit son temps pour finir sa carafe de sang, Lilith n’en était qu’à la moitié de la sienne. Alfonse, zélé, faisait un service impeccable, comme toujours.
Une fois Annabelle endormie, elle se rendit dans le grenier et, comme la dernière fois, s’allongea sur le parquet. La trappe grinça. Elle se remit debout précipitamment. Elle se dit fugacement qu’elle aurait du mettre quelque chose sur sa robe de chambre translucide lorsqu’elle vit apparaître Edward. Gênée, elle croisa ses bras sur sa poitrine. Le vampire, qui ne s’attendait pas à la trouver là, marqua un temps d’arrêt à sa vue, le souffle coupé. De son côté Lilith ne s’attendait pas à voir Edward de si tôt, surtout torse nu. Figés les deux vampires s’observèrent un long moment sans savoir que faire. Respirant un grand coup, Edward reprit contenance et fini de gravir les marches avant de refermer la trappe.
- Que faites-vous ici ? murmura-t-il
- Je n’arrivais pas à dormir, répondit la jeune fille en pensée
- Comment avez-vous pu être aussi sotte ? ne pu retenir le jeune homme
Vexée, Lilith ne répondit pas.
- Vous rendez-vous compte qu’il aurait pu vous tuer ? continua-t-il en s’approchant d’elle
Lilith le regarda s’avancer vers elle sans bouger, sans pouvoir détacher ses yeux de lui, de ses cheveux noirs en bataille, de ses yeux bleus qui lançaient des éclaires. Il la saisit par les épaules violemment. La jeune fille posa ses mains sur son torse pour le repousser. Électrifié par ce contacte, le jeune homme desserra sa prise avant de lever une main.

Lilith se crispa et ferma les yeux, s’attendant à recevoir une gifle. Mais il se contenta de lui caresser la joue du bout des doigts. Une caresse douce et tendre. Surprise, elle leva les yeux vers lui et son cœur manqua un battement. Le regard profond du jeune homme débordait de désir. Gênée, Lilith entrouvrit légèrement les lèvres, cherchant de l’air. Elle avait chaud malgré sa tenue légère. Elle se senti rougir. Jamais un homme ne l’avait regardée de cette façon. Elle ne connaissait rien à ces choses là, elle n’avait même jamais été embrassée de son vivant et se surpris à souhaité qu’il soit le premier. Leurs pensées tourbillonnantes s’entrechoquaient confusément. N’y tenant plus, Edward se pencha lentement vers elle. Ne la voyant pas reculer, il posa ses lèvres sur les siennes délicatement, comme si elle risquait de se briser au moindre choc.
La sentant frémir contre lui, il la serra plus étroitement, approfondissant son baiser. Elle était douce, elle sentait bon. Comme dans un rêve, il senti les doigts fins de la jeune fille se nouer autour de son cou. Une main au creux de ses reins, il lui caressa le dos de l’autre. Il sentait son inexpérience et cela le réjouit bêtement. Cela faisait si longtemps qu’il n’avait par serrer une femme contre lui. Mais il n’en avait jamais désiré aucune aussi fort.
Lilith aurait voulu rester comme ça pour toujours. Elle n’arrivait plus à réfléchir de façon cohérente. Ce fut lui qui mit fin au baisé. Essoufflés, ils mirent un moment à reprendre leurs esprits. Lilith resta contre lui. Les jambes en coton, elle avait peur de tomber si elle le lâchait. Tendu, Edward essayait tant bien que mal de réfréner ses pulsions. Le corps délicat de la jeune fille pressé contre lui mettait son sang froid à rude épreuve mais il ne voulait par aller trop vite.
Aucun d’eux ne voulait parler, de peur de briser la magie qui imprégnait l’atmosphère. Ce fut donc sans un mot qu’Edward lui prit la main et l’entrainât hors du grenier. Il la fit entrer dans sa chambre. Elle était épurée, sans aucune décoration. Seule une énorme armoire et un superbe coffre meublait la pièce. La jeune fille paniqua légèrement à la vue du lit. Sentant sa tension, Edward lui prit la main et ne bougea plus. Lorsqu’elle s’approcha de lui et posa la tête contre lui, il se senti fondre. Il avait tant refoulé ses sentiments qu’il n’arrivait plus à les retenir. Emu, il se contenta de poser son autre main dans le dos de la jeune fille. Ce fut elle qui l’entrainât vers le lit. Debout à côté, elle ne sut que faire ensuite et leva les yeux vers lui. Le désir se mêlait à la peur, elle ne savait pas ce qu’elle voulait. Il se pencha et l’embrassa de nouveau. Lorsque leurs lèvres se séparèrent, elle se rendit soudain compte qu’elle était allongée sur le lit. Avec un sourire charmeur, Edward roula sur le côté et la serra contre lui. La tête sur son épaule, elle n’avait pas peur. Sa confiance était totale et il en avait terriblement conscience.
Le lendemain matin, Lilith se réveilla dans les bras d’Edward, toujours profondément endormit. Il n’avait rien tenté, il s’était contenté de l’embrasser passionnément et de la serrer contre lui. Son besoin d’affection l’avait effrayée mais elle s’était ensuite rendu compte qu’elle en avait tout autant besoin. Etre serrée dans les bras de quelqu’un ne lui était jamais arrivé, pas même par sa propre mère. Elle regarda le beau visage endormi du jeune homme. Etait-elle amoureuse de lui ? Oui, depuis la première seconde où il l’avait tenue dans ses bras, quand il avait murmuré son nom, ses yeux bleus posés sur elle. Elle avait eut trop peur ce jour là pour s’en rendre compte, c’était trop tôt. Et s’il ne l’avait par embrassée dans le grenier elle ne se serait probablement pas rendue compte qu’elle l’aimait, même si elle avait conscience qu’il l’attirait. Il était si étrange avec elle. Elle savait pourquoi maintenant, il lui avait ouvert son cœur cette nuit. Il s’était interdit de penser à elle, à aucune femme, seule sa mission comptait. Il avait tenté de masquer son désir par de la colère, de faire en sorte qu’elle le repousse. Elle passa sa main sur son torse musclé et sursauta en voyant son bras bougé.
- Je suis désolée de t’avoir réveillé, s’excusa-t-elle
Il se contenta de lui répondre par son sourire charmeur avant de se pencher pour l’embrasser passionnément.
La porte s’ouvrit soudain sur Alfonse.
- Monsieur, il est l’heure de…OH !
Lilith se recroquevilla sous les couvertures, les joues rouge, tandis qu’Edward se relevait d’un bons, la cachant derrière lui.
- ALFONSE !
- Tout de suite monsieur ! Pardon monsieur…mademoiselle ! balbutia le vieil homme en refermant précipitamment la porte
Le cœur battant, le majordome s’adossa à la porte pour reprendre son souffle. Il n’en croyait par ses yeux. Un sourire béat sur le visage, il repartit encore tremblant vaquer à ses occupations.
Edward poussa un gémissement de frustration et se passa la main dans les cheveux.
- Je suis désolée, je l’avais complètement oublié
Il avait l’air tellement gêné, tout penaud, comme un petit garçon surpris en train de faire une bêtise. Son air contrit la fit fondre. S’asseyant à son tour dans le lit, le sourire aux lèvres, elle se colla à lui et posa la tête sur son épaule.
- Je dois retourner dans ma chambre pour voir si Annabelle dors encore
- Très bien, laisse-moi deux secondes
Surprise, la jeune fille le vit disparaître dans la salle de bain à toute allure. Il revient une minute pile plus tard, entièrement lavé et habillé. Bluffée, la jeune fille se leva. Il lui mit son peignoir sur les épaules et c’est main dans la main qu’ils sortirent. Annabelle dormait encore, toute petite au milieu du grand lit.
- Tu veux bien rester près d’elle pendant que je me prépare s’il te plait ? demanda Lilith
Le vampire hocha la tête en silence et s’assit au pied du lit tandis que la jeune fille disparaissait à son tour dans la salle de bain. Il regarda la petite dormir paisiblement, les cheveux tout emmêlés. Il n’avait jamais vraiment fait attention à elle. Elle paraissait si fragile en cet instant. Lilith ressorti quelques instants plus tard, dans une petite robe d’été blanche brodée de délicates petites roses rouges. Ils sortirent en silence et partirent prendre leur petit déjeuner. Lilith ne put se retenir de rougir quand Alfonse lui servit un premier verre de sang. Amélia babillait gaiement avec Shana qui ne répondait que par monosyllabe. Sous la table, Lilith senti la main d’Edward sur la sienne et se mit à sourire s’en pouvoir s’en empêcher. Annabelle traversa le plafond avant de s’asseoir sagement à côté de Lilith.
Après le diner, Edward envoya Shana faire un tour de ronde tout autour du manoir puis d’aller se poster sur le toit pour surveiller les alentours. Amélia redescendit à la cuisine et Alfonse débarrassa la table en s’efforçant de garder un visage impassible.
- Je peux aller jouer avec Loucifer ? demanda Annabelle, des étoiles dans les yeux
- Bien sur ! répondit Edward
La petite fille poussa un cri de joie et flotta en direction de la cuisine.
- Elle semble plus heureuse aujourd’hui, remarqua Edward en la suivant des yeux
- Elle n’aime pas que je me batte, ça lui fait peur, elle ma demandé plusieurs fois d’arrêter, répondit la jeune fille avec tristesse
Le vampire hocha la tête. Lui non plus n’aimait pas ça, mais tant que William était encore en liberté, ou en vie, il n’était pas raisonnable de se laisser aller.
- Ça attendra demain, aujourd’hui j’aimerai discuter, commença-t-il, hésitant
- A quel sujet ? s’inquiéta la jeune fille
- De nous, je…, bégaya-t-il en se passant une main dans les cheveux
Lilith sentait le jeune homme tiraillé entre sa mission et elle. Ne voulant pas l'obliger à faire un choix, elle se leva et l'embrassa passionnément, pour lui faire oublier un instant ses soucis. Pour qu'il ne fasse pas un choix qu'il risquait de regretter. Le soulagement du jeune homme lui fit un choc mais elle se contenta de le serrer plus fort dans ses bras.

Perchée sur le toit, Shana observait les alentours du manoir depuis le matin. Sa main la lançait sous son bandage, c’était pour bientôt. Tendue, immobile telle une statue de pierre, la jeune femme humait l’air, méfiante. L’ennemi était peut-être fou mais elle ne le sous-estimait pas. Il faisait très souvent preuve d’une lucidité ahurissante et, pour l’avoir affronté une fois déjà, elle savait ce dont il était capable. La nuit était déjà tombée depuis un moment déjà.

- William ! s’exclama sensuellement la femme, tu m’appel à une heure bien tardive, mon vieil ami, à cette heure je me demande de quels services tu as besoin ?
Elle observa un moment le vampire couvert de sang et le tas de chaire informe à ses pieds.
- Oh tu aurais pu m’inviter à ton festin, tu ne m’as rien laissé…
- Te rappel-tu de t’as dette, Natasha ? gronda le vampire
- Eh bien, quelle entrée en matière William, comme d’habitude, ronronna la femme, son regard de braise posé sur lui
Elle posa une main délicate sur son torse et lui tourna autour, telle une panthère traquant sa proie. William la repoussa, hérissé à son contacte. Alors qu’elle partait d’un rire rauque et suave, il lui tordit le bras, lui tirant un gémissement de douleur mêlé de plaisir.
- Que désires-tu mon ami ? susurra-t-elle en renversant la tête en arrière, plongeant son regard dans celui du vampire, un sourire carnassier aux lèvres
Le vampire la rejeta loin de lui, dégouté.
- Alors mon cher, je me déplace pour te retrouver dans ce trou à rats, ce…cette mine poussiéreuse, et tu ne m'accueil pas comme il se doit, gronda la sorcière, mécontente
- Ca te tente un petit bain de sang ? répliqua-t-il
- Ce soir ? où ça ? le questionna la sorcière en s’approchant vivement, j’aurai le droit de m’amuser jusqu’à quel point ? ajouta-t-elle en se passant la langue sur les lèvres

Il faisait nuit noire et le carillon venait à peine de sonner vingt deux heures. Nerveuse, Lilith suffoquait dans son lit. Elle sentait William s’agiter…se déplacer ? Se redressant violement, elle prit soudain conscience qu’il se rapprochait. Paniquée, Lilith sortit de son lit brusquement, réveillant Annabelle. Elle se précipita sur la porte et l’ouvrit à la volée avant de disparaître dans le couloir sombre bordé de chandeliers constamment allumés, laissant la fillette tremblante de peur sous les couvertures. Tandis qu’elle courrait, la jeune fille envoyait ses pensées tout azimut vers Edward, paniquée. Elle vit le vampire ne vit pas le vampire sortir de son bureau mais la porte s’ouvrit violement et elle se retrouva dans ses bras en quelques secondes.
- Calme toi, ça va aller, je préviens les autres, va chercher Annabelle et…
Une explosion fit trembler le bâtiment. Le toit venait d’être réduit en miette.

La vibration qui l’avait attaquée, invisible, pulvérisa le toit. Shana, qui avait évité l’attaque juste à temps, tapis contre le mur, observait le noir sans rien distinguer. Plaçant sa main bandée sur le crâne de bélier accroché au bas de son corset. Murmurant une incantation, le crâne de la bête s’illumina brièvement. L’instant suivant, elle roulât dans l’herbe, évitant tout juste une nouvelle attaque sans avoir pu voir d’où elle venait. Un choc puis un petit cri de femme déchira la nuit. Une forme noire chuta lourdement au sol, suivie de près par une ombre qui se rua vers la démone avant de reprendre sa place dans le crâne animal.

Réfugiée dans une pièce qu’elle ne connaissait pas, au centre du manoir, Lilith angoissait. Edward et Alfonse, armés et prêts, ne détournaient pas les yeux de l’unique porte de la pièce qui n’avait aucune autre ouverture. Amélia faisait barrière de son corps pour protéger Annabelle et Lilith, ses yeux également posés sur la porte. Des pas calmes résonnèrent dans le couloir et stoppèrent juste devant la porte. La jeune fille se tordit de douleur. Amélia la rattrapa juste avant qu’elle ne tombe au sol. Un voile noir obscurci son regard.
- Je suis aveugle ! paniqua la jeune fille
Edward ne bougea pas d’un pouce, les yeux toujours rivés sur la porte, malgré le cri d’angoisse de Lilith. Elle senti Amélia la faire asseoir au sol et les bras d’Annabelle entourer son cou. Tâtonnant, elle se mit à lui caresser ses cheveux, espérant calmer la petite tout autant qu’elle-même.

Encerclée par l’ombre et la démone, la sorcière partit d’un rire rauque avant de se relever, une main vers le ciel. Shana bondit vers elle, le poignard à la main. La sorcière contra l’attaque par une barrière d’onde qui repoussa la démone plusieurs mètres en arrière. Elle se réceptionna agilement mais retomba, un genou à terre.
- Pauvre chose sans aucun pouvoir, ricana la sorcière, et ça se dit démone, tu n’es même pas capable de lancer du feu !
Shana ne répondit rien, immobile, les yeux rivés sur la sorcière.
- Pense-tu pouvoir me battre avec une seule main ? continua Natasha en approchant lentement
Levant le bras, paume vers le bas, la sorcière attira une pierre à elle qu’elle modula pour en faire une épée qu’elle saisit à deux mains.
- Sans une lame adéquate, tu sais que tu ne me vaincras pas, ronronna-t-elle, je ne sais pas qui tu es mais tu es bien stupide de t’attaquer à moi blessée et armée de ce vulgaire poignard tout juste bon à couper du beurre
Shana l’observa, sa main bandée le long de sa cuisse, son poignard levé en position de défense, le genou toujours à terre. Natasha se mit à rire de façon hystérique, rejetant ses cheveux roux en arrière, avant de se précipiter sur la démone. Parant le coup d’épée avec son poignard, Shana plaqua sa main bandée paume vers le ventre de la sorcière au-dessus d’elle. Ecarquillant les yeux, la sorcière sentit le rayon de lumière la transpercer de part en part, la soulevant du sol. Elle retomba violement, mortellement blessée. Shana s’approcha prudemment d’elle, sur ses gardes, féline.
- Oh…je vois qui tu es maintenant, murmura la sorcière, la fille des deux mondes…
Natasha toussa du sang. Respirant avec peine. Levant une main au dessus de son vente elle tenta un sort de soin mais la démone la lui transperça de son poignard, lui tirant un hurlement strident. Reprenant son souffle, la sorcière riva ses yeux à ceux de la démone.
- Ni d’en haut, ni d’en bas, chantonna-t-elle, exilée…au milieu, personne n’en…veut, la fille aux cornes…de démon…et aux ailes d’ange….
Impassible, Shana regarda la sorcière exhaler son dernier soupire. Récupérant son poignard elle se dirigea vers le manoir décapité, sa main bandée plaquée contre sa poitrine. La sorcière avait été une redoutable adversaire, son sort de protection cachait un sort parasite. Shana ne s’en était rendue compte qu’en retombant. La sorcière morte, il aurait tôt fait de disparaître, mais non sans avoir fait quelques dégâts. La démone chuta avant d’avoir atteint la cuisine, face contre terre, la main crispée sur son poignard. Elle entendait le combat faire rage dans le manoir. Fermant les yeux, elle murmura une incantation en langue angélique. Un sort de soin.

Les deux vampires se battaient furieusement dans le couloir. Quand Edward le propulsa en arrière, Amélia attrapa Lilith par la main et saisi Alfonse, inconscient, sous son bras avant de les entraînés hors de la pièce, fuyant les lieux. Annabelle accrochée à son autre main, elle dirigeait la vampire tant bien que mal pour lui éviter les obstacles ou l’aider à tourner. Lilith ne voyait toujours rien William avait infiltré son esprit sans qu’elle ait pu le repousser. Arrivés dehors par la cuisine, Amélia aperçu Shana au sol.
- Oh c’est pas vrai, je n’ai que deux bras moi, s’énerva-t-elle en se précipitant sur la démone

Annabelle tremblotant dans ses bras, Lilith essayait de se calmer. La fillette, courageuse, ne pleurait pas. Amélia avait retourné Shana, dont les lèvres bougeaient étrangement, et avait essuyé la terre et le sang lui la maculait, avant d’aller s’occuper du majordome toujours évanoui. Etre projeté violement contre un mur à son âge n’était pas vraiment conseillé. Shana Alfonse sous un bras et la démone sous l’autre, partit les déposer dans la maison des serviteurs un peu plus loin, abandonnant quelques instants Lilith et Annabelle.
- Ne bougez pas je reviens tout de suite ! promis-t-elle en marchant le plus vite qu’elle pouvait
Lilith se concentra sur sa respiration, se remémorant les conseils d’Edward. Son cœur battait la chamade, comme s’il cherchait à s’échapper de sa poitrine. Serrant convulsivement la fillette dans ses bras, elle posa sa joue sur le haut de sa tête, les yeux fermés, avant de se mettre à la bercer. Elle se mit à chanter une berceuse, dans sa tête. Celle que sa gentille voisine lui chantait pour la rassurer quand elle venait se réfugier chez elle après que sa mère l’avait mise dehors, ivre de rage. Dans ces moments là, elle se mettait à songer que cette femme était sa mère, une douce mère tendre et aimante. Ses souvenirs douloureux lui firent monter les larmes aux yeux tandis qu’elle se perdait dans ses pensées. Un bruit sourd la fit sursauter. Ouvrant les yeux, elle s’aperçu que ses larmes avaient nettoyé le voile noir. Elle y voyait à nouveau parfaitement bien.
Une fenêtre éclata et l’un des vampires tomba tête la première. Au dernier moment, il bascula pour se réceptionner sur ses pieds en position accroupi. Il se releva lentement et Lilith fut parcouru d’un frisson d’angoisse. Elle se redressa lentement. William avançait vers elle, son regard de dément fixé sur elle.
- Lilith, je suis venu te chercher…
Il s’interrompit lorsqu’Edward atterrit à son tour sur l’herbe tendre, à quelques mètres de lui.
- Lilith, cours ! hurla le vampire avant de se jeter sur William
Celui-ci subit les coups sans même songer à les rendre, avançant inexorablement vers la jeune fille. Pétrifiée, elle n’arrivait pas à bouger. Annabelle, pendue à sa jupe, se mit à pleurer en la tirant vers la maison. Reprenant ses esprits, elle attrapa la main de la fillette et se précipita dans le manoir.
- Non ! Lilith ! hurla William
Edward s’agrippa à sa chemise et le projeta au sol tandis que les deux filles pénétraient dans la cuisine. Haletante, Lilith ouvrit un tiroir à la volée et saisit un long couteau de cuisine avant de repartir en courant vers l’escalier en colimaçon menant à la salle à manger.

William se releva, furieux.
- Elle est à moi ! hurla-t-il en lançant son poing
Edward évita le coup de justesse en s’accroupissant avant d’envoyer le sien directement au menton de William. Celui-ci fut soulevé du sol sous le choc et Edward tournoya sur lui-même avant de lancer sa jambe dans les côtes de son adversaire, le projetant au loin. Se relevant avec une rapidité ahurissante, William fonça sur Edward tête la première. Le choc fut tel que le jeune homme vola jusqu’à heurter le mur de pierre du manoir violement. Sonné, la tête en sang, Edward n’arriva pas à se relever.
Au-dessus de lui, crachant du sang, William leva le poing lorsqu’Amélia déboula pour l’attaquer dans son dos. Plus lente que le vampire, elle fut surprise lorsqu’il la contourna sans qu’elle puisse suivre son déplacement du regard. Stoppée nette dans son élan, elle senti le cou dans sa nuque, si violent qu’elle en fut paralysée. Voyant ses ennemis à terre, William se dirigea vers la cuisine d’un pas tranquille, reprenant son souffle. Il savait exactement où elle était allée se cacher. Amélia rampa jusqu’à Edward, il devait absolument lui remettre les vertèbres de la nuque en place pour qu’elle puisse aller aider Lilith.
Paniquée, Lilith s’était précipitée vers le seul endroit où elle se sentait bien, le grenier. Elle souleva la trappe, elle se rua à l’intérieur et la referma. Avisant la moitié de toit effondrée, elle essaya de tirer des morceaux de poutre pour bloquer l’ouverture mais c’était trop lourd. Malgré son entraînement, elle n’était par devenue assez forte, elle n’arriverait jamais à tenir tête à William. Relevant la tête, elle entendit le silence soudain. Les deux vampires étaient d’une rapidité telle qu’elle n’arrivait pas à les suivre du regard. Ce silence lui fit l’effet d’une douche froide. L’angoisse la saisie à la gorge et elle s’effondra au milieu des gravats, le couteau serré contre elle. Annabelle entassait des petits morceaux de bois et de tuiles brisées sur la trappe. Frappée par la panique de la fillette, Lilith couru la prendre dans ses bras et l’éloigner de la trappe.
Alors qu’elle s’adossait en tremblant à une poutre tombée en travers du grenier, la trappe s’ouvrit à la volée, dispersant les débris entassés. Perdant sa consistance solide, Annabelle échappa des bras de Lilith et traversa le sol du grenier. Seule face à William, Lilith eut un malaise. William se précipita sur elle et la rattrapa avant que sa tête ne touche le sol. Il s’agenouilla près d’elle et la pris dans ses bras.
- Lilith, murmura-t-il contre son oreille, je t’ai enfin retrouvée
Il respira l’odeur de ses cheveux et lui caressa le bras jusqu’à sa main. Saisissant le couteau, il le lança loin d’eux. Lilith, toujours paralysée entre ses mains, tremblait comme une feuille.
- Tu es heureuse ? questionna-t-il fiévreusement
Inerte, la jeune fille ne répondit pas.
- Ils sont morts tous les deux, ceux qui nous ont fait souffrir, marmonna-t-il comme un dément, tu es comme moi, je te connais...
Les paroles du vampire mirent du temps à atteindre sa conscience. Lorsqu’elle se rendit compte de ce qu’il osait prétendre, la jeune fille se redressa.
- Non !
- Non ? souffla-t-il, déstabilisé
- Je ne suis pas toi, tu ne me connais pas !
- Qu’est-ce que tu raconte Lilith ? William semblait totalement perdu, sa démence ne lui permettant pas d’accepter ce qu’elle lui disait
- Je ne serai jamais comme toi !
- Mais…
- Le chevalier t’as fait du mal et tu l’as tué, tout comme ma mère ma fait du mal, mais ce n’est pas moi qui l’ai tuée, c’est toi, et toi aussi tu ma fait du mal !
Reprenant ses esprits, Lilith se releva, s’arrachant à l’étreinte de William.
- Non ! hurla-t-il en se levant avec une rapidité fulgurante en attrapant son bras violement, tu es à moi !
Il la gifla avant de la jeter à terre, ivre de rage. Traversant le sol comme une bombe translucide, Annabelle percuta le vampire qui vola au milieu des décombres. Edward surgit de l’ouverture de la trappe et se précipita pour relever Lilith. Lui relevant le visage, il frôla sa joue du bout des doigts, là où un bleu se formait déjà. William hurla lorsqu’il aperçu le couple enlacé. Edward bascula Lilith derrière lui, prêt à amortir le choc de l’attaque.
- Non William, arrête ! hurla la jeune fille, son cri muet résonnant dans la tête des deux hommes
Il stoppa net à un mètre à peine du couple, haletant, les yeux hagards.
- Lilith, murmura-t-il en tendant sa main vers elle
Il ne voyait qu’elle, il la voulait tellement. Elle était comme lui.
- Va-t-en, laisse-moi tranquille, je ne veux plus jamais te voir ! lui lança-t-elle rageusement
Elle l’observa tandis qu’un bref éclair de lucidité illuminait le regard éteint du vampire qui commença à fumer sous la lumière du soleil levant. Edward attrapa Lilith et recula sous la moitié de toit qui n’était pas détruite, sous les yeux de William qui ne bougea pas d’un pouce.

Pétrifié, le couple regardait William fumer de plus en plus. Le soleil à peine levé le brûlait profondément sans qu’il ne fasse un seul mouvement. Il se contentait de les fixer, le regard vide. Lilith compris lorsqu’Edward lui cacha le visage dans sa chemise déchirée. Il se laissait mourir.
- Lilith, murmura le vampire
Sa peau brûlait lentement, brunissant, craquelant, tombant en poussière. Il se tourna face au soleil et avança un peu plus dans la lumière dont la brûlure lui labourait le corps. Edward recula le plus possible, il était trop tard pour atteindre la trappe. Eux aussi allaient être réduits en cendre. Serrant la jeune fille contre lui, s’accrochant à elle de toutes ses forces, Edward se força à regarder William se décomposer lentement. Lorsque le vampire tomba à genoux, il senti Lilith sursauter.
La jeune fille avait fait le noir, pour oublier la vision de William en train de mourir à petit feu. Lorsqu’elle l’entendit tomber au sol, la porte réapparue. Elle se précipita pour l’ouvrir. Il était derrière, il l’attendait. La folie avait disparu, le soleil l’avait purifié, lavé de son passé, de ses souffrances.
- Tu as fait le bon choix, Lilith, commença-t-il, je n’aurai jamais pu te rendre heureuse
- William…Il lui essuya une larme délicatement. Il était soulagé, la mort était sa délivrance.
- Je n’ai plus mal maintenant, le soleil n’est pas douloureux, pas autant…je regrette…
Le vampire disparu, se fondant dans le noir de son esprit. Elle entendit distinctement le reste de son corps chuter sur les gravats et se mit à pleurer de plus belle. Elle senti Edward essayer d’échapper à la lumière mais le mur le barrait la route, dans quelques minutes il serait trop tard. La trappe s’ouvrit d’un coup, laissant apparaître Amélia puis d’Alfonse, portant tout deux les lourds rideaux qui masquaient les fenêtres.
- Allé allé sous le rideaux ! cria la zombie en emmitouflant Lilith avant de la soulever et se précipiter pour la porter en lieu sur, laissant entrevoir durant quelques secondes les ossements calcinés de William
- Veuillez me pardonner monsieur, s’excusa Alfonse qui fit de même avec le vampire, mais sans toutefois le porter
Une fois tous réfugiés dans la bibliothèque qui avait miraculeusement échappée au carnage, ils retrouvèrent Annabelle qui les attendait sagement, un livre d’images sur les genoux. Elle se précipita sur Lilith en pleurant de joie, et fit de même avec Edward.
- Alfonse chercher la voiture, si elle est en état de rouler
- Bien monsieur s’inclina le majordome avant de se précipiter en vacillant hors de la pièce
- Où allons nous ? demanda la zombie
- Voir l’empereur

Ce fut Amélia qui prit le volant, Alfonse ayant pris un trop mauvais coup à la tête lorsqu’il s’était écrasé contre le mur. Ils furent tous pris en charge à leur arrivée. Le majordome fut transporté à l’hôpital le plus proche par peur d’un traumatisme crânien. Shana fut conduite à l’infirmerie du palace auprès de leur sorcier personnel. Les vampires eurent double dose de sang et Amélia une grosse tranche de bœuf cru. Annabelle se contenta de regarder le va et vient des domestiques, assise sur les genoux de Lilith qui lui caressait les cheveux tendrement. Après s’être restaurés, chacun allât dans sa chambre pour se laver et se reposer.
Revenant de la salle de bain vêtue d’une robe de chambre bleu pâle, Lilith se coucha à côté de la fillette. Epuisée, elle s’endormie en quelques secondes. La fillette la contempla quelques minutes avant de fermer les yeux, soulagée. C’était fini, le méchant avait perdu, ils allaient enfin pouvoir vivre comme une famille normale.
Lilith dormi d’une traite, sans rêver. Au réveille, elle contempla Annabelle, perdue dans les couvertures. Elle avait été très courageuse et méritait un cadeau. Se détachant précautionneusement des petits bras qui l’entouraient, Lilith se précipité dans la salle de bain avant de sortir en silence de la chambre.

Un mois après le drame, le manoir était en pleine reconstruction. Confinée dans la bibliothèque, Lilith avait du mal à se concentrer sur son livre tan les humains mettaient du cœur à l’ouvrage, sous les encouragements d’Amélia. Levant les yeux en soupirant, elle les posa sur Annabelle qui n’en finissait pas de câliner son petit chiot…fantôme, Loucifer ayant été pulvérisé par les débris du toit alors qu’il tentait de fuir. La découverte de son cadavre avait perturbé tout le monde et Lilith, qui justement cherchait encore un moyen de récompenser le courage de la fillette, avait sauté sur l’occasion, même si elle aurait pu largement s’en passer, tant les pleurs de la petite fille lui avaient fait mal.
Edward entra dans la pièce, suivi d’Alfonse et d’Hugues son jeune neveu. L’adolescent, un rebelle au cœur tendre, était formé par Alfonse pour être le futur majordome d’Edward. Ses cheveux ébouriffés au gel et ses tatouages ressortaient étrangement avec son costume noir et son nœud papillon. Mal à l’aise l’adolescent courba le dos avant d’être rappelé à l’ordre par son oncle sur un ton sec.
Amélia traversa le couloir en courant, hurlant que l’aile ouest était enfin terminée sans s’arrêter, les bras chargés de lourds rideaux de velours gris.
- Aujourd’hui, Hugues va apprendre à s’occuper des petites filles…commença Edward
- Eh puis quoi encore, j’aime pas les enfants et j’aime pas les filles donc les petites filles je les…
Alfonse lui donna une tape sur la tête pour le faire taire. Le vampire se racla la gorge, un regard inquisiteur rivé sur le jeune homme qui détourna les yeux, la mine boudeuse. Annabelle se précipita pourtant sur lui et s’accrocha à l’une de ses jambes en riant. Faisant mine de vouloir s’en débarrasser, il secoua la jambe mollement.
- Alfonse, va vérifier qu’Amélia n’approche pas du ciment, elle y a déjà presque perdu un doigt, ordonna Edward, Hugues va jouer dehors avec Annabelle et…
- Nan je joue pas moi, j’ai 15 ans !
- …et si tu n’obéis pas, 15 ans ou pas, je te donne une fessée !
Soupirant, l’apprenti majordome boitilla hors de la pièce, Annabelle toujours accrochée à sa jambe morte de rire. Le chiot leur couru autour en produisant des couinements insupportable. Le vampire referma la porte sur eux avant de se tourner vers Lilith. La jeune fille referma son livre et se leva de sa chaise, le sourire aux lèvres.
- Heureusement qu’Alfonse est encore là, nous serions tous perdus sans lui, plaisanta la jeune fille en s’approchant
La saisissant par la taille, le vampire lui effleura la joue d’un baisser léger comme un nuage.
- Je ne suis pas sur que tu ais eut une bonne idée avec ce chiot, il est pénible
Lilith éclata d’un rire cristallin en balançant gracieusement sa tête en arrière. La cicatrice que lui avait faite William était toujours imprimée sur sa peau délicate mais l’opération avait été un succès. Le chirurgien avait réussit à réparer son larynx mal formé qui l’empêchait de prononcer le moindre son en ne laissant qu’une petite cicatrice quasi invisible.
- Que penses-tu d’Hugues ? questionna Edward
- Il est intelligent, attentionné, profondément gentil…
- Rebelle, compléta le vampire
- Une forte tête, tout comme Alfonse, il doit simplement apprendre à être plus subtile
- Oh ça ne devrait pas tarder avec un oncle tel que le sien !
Lilith s’esclaffa encore avant de s’accrocher à nouveau à ses lèvres, les yeux dans les yeux, comme s’ils voulaient se perdre l’un dans l’autre.